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La domestication des populations
Flashmag! Issue 163 August 2025
Dans plusieurs États africains où les dirigeants s’ accrochent au pouvoir, une transformation lente mais profonde des dynamiques sociales est observée. Ce phénomène, que certains désignent comme une“ domestication” des populations, conduit les citoyens à devenir des spectateurs de leur propre histoire, désarmés face aux agressions extérieures et aux injustices internes. Ce formatage mental est alimenté par la propagande, la peur et l’ appauvrissement de l’ éducation, créant une culture de résignation. Les dictateurs africains utilisent des vecteurs de communication multiples et multiformes, favorisés par des prédispositions des populations à y répondre. Après les indépendances, de nombreux dirigeants africains, malgré les souffrances subies sous l’ administration coloniale, ont infligé des ravages similaires au continent, se montrant assoiffés de pouvoir, égoïstes et insensibles. La longévité des dictatures favorise l’ inertie citoyenne en cultivant la soumission comme valeur et en construisant une identité nationale basée sur la dépendance plutôt que sur la résilience. Les dictatures civiles sont caractérisées par une longue conflictualité qui empêche la pacification des relations politiques. Depuis Mobutu Sese Seko jusqu’ à Paul Biya, en passant par Eyadéma ou Omar Bongo, les dictateurs africains ont tous compris une chose fondamentale: pour durer, il ne suffit pas de réprimer— il faut séduire, infantiliser, reprogrammer la conscience nationale. Mobutu, par exemple, n’ a pas seulement interdit les partis politiques ou les manifestations. Il a imposé l’ authenticité zaïroise, une idéologie culturelle qui glorifiait sa personne comme“ guide éclairé”, modifiait les noms, les tenues, les références historiques— jusqu’ à effacer toute trace de l’ ère coloniale … pour mieux installer une dictature cognitive. Le journal télévisé commençait et finissait par un portrait du président. Ses discours étaient retransmis dans les écoles, les marchés, les églises. Le culte du chef devenait un culte de l’ âme. « Quand le pouvoir devient sacré, la critique devient sacrilège. »

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